Prévisions Économiques De 2019 – Que Nous Réserve La Nouvelle Année?
Les festivités de fin d’année 2018 semblaient un moment tout indiqué pour tenir l’événement annuel de Richter consacré aux prévisions économiques. Nous en avons profité pour lever nos verres à l’année qui tire à sa fin et en apprendre davantage sur ce que 2019 réserve aux propriétaires d’entreprises.
Le conférencier pour l’occasion n’était nul autre que M. Douglas Porter, économiste en chef et premier directeur général de BMO Groupe financier. Alors que les participants aux événements tenus à Montréal et à Toronto s’installaient confortablement, M. Porter leur réservait des surprises.* Voici un résumé des hauts et des bas, de certains points positifs et négatifs ainsi que des zones d’incertitude à prévoir au cours de la nouvelle année :
L’ALENA devient l’ACEUM
Même si la signature d’un nouvel accord a dissipé quelques incertitudes (au moment de la publication, l’accord n’était toujours pas approuvé par le Congrès), certaines questions demeurent toujours sans réponse. Et la plus importante d’entre elles concerne la clause relative aux ententes avec des pays qui ne font pas partie du marché. Reste à voir si les ententes commerciales à venir devront réellement être approuvées par les États-Unis et le Mexique. Cette clause pourrait limiter les chances du Canada de signer des ententes de libre-échange avec des pays comme la Chine. Mais en 2019, il sera avant tout intéressant de voir si le nouveau Congrès américain souhaitera ou non réviser l’ACEUM avant de l’approuver. Comme l’indiquait M. Porter, tout porte à croire que si des changements devaient y être apportés, ceux-ci toucheraient principalement les règles américaines, ce qui voudrait dire que l’on ne reverrait pas l’accord dans son intégralité. Dans l’ensemble, le nouvel accord a au moins réussi à rassurer de nombreux propriétaires d’entreprises.
Marchés
Les marchés canadiens se sont redressés pendant environ une journée après la présentation du nouvel accord commercial. Mais depuis, le marché des actions canadiennes est en baisse, à l’instar du huard. Les marchés ne réagissent pas seulement à l’entente. En effet, ils fluctuent suivant la deuxième grande correction des actions américaines et la volatilité qui se fait sentir sur l’ensemble des marchés des actions. Plus important encore, la hausse des taux d’intérêt à long terme qui a été observée au cours des deux dernières années semble enfin avoir cessé. Le taux d’intérêt à 10 ans aux États-Unis a atteint 3,2 % et l’envergure de la fluctuation a été semblable au Canada. Cette « réinitialisation des taux » plombait également les marchés des actions mondiales au début de 2018, mais la dernière chute du prix du pétrole a une fois de plus entraîné à la baisse les taux à long terme.
En fait, l’économie mondiale se porte très bien depuis quelques années. Le taux de croissance pour 2018, compte tenu de l’inflation, est presque égal à celui de l’année précédente. M. Porter a indiqué qu’il ne s’attendait qu’à un léger ralentissement de la croissance pour 2019, et bien que la croissance mondiale puisse se situer quelque peu sous la moyenne, elle demeurera généralement positive au cours de la prochaine année.
Stabilité de la croissance économique, baisse du taux de chômage et hausse des salaires
Le Canada a enregistré la croissance la plus rapide de tous les pays du G7 en 2017, mais la donne a bien changé en 2018 : taux de croissance s’est chiffré à environ 2 % (ce qui est considéré comme « normal » pour le Canada). Les prévisions indiquent que ce taux devrait se maintenir l’an prochain. Aux États-Unis, c’est une tout autre histoire : un certain retour au calme est prévu, mais compte tenu des mesures de stimulation budgétaire, ce pays devrait rester à la tête du peloton du G7.
Non seulement les impôts ont-ils été réduits radicalement aux États-Unis l’an dernier, mais le Congrès a aussi accru les dépenses visant la défense et les programmes sociaux, ce qui a entraîné une hausse d’environ 1 % du taux de croissance. Cependant, bon nombre d’experts soulignent que cette croissance ne pourra pas être maintenue à long terme. Le déficit du pays est immense – il devrait atteindre un billion de dollars cette année – et on a du mal à comprendre pourquoi les États-Unis continuent de stimuler l’économie alors que le taux de chômage est faible (moins de 4 %) et devrait diminuer encore plus au cours de la prochaine année. Les experts ne conseillent pas au Canada de faire de même, étant donné que le taux de chômage au pays est également très faible.
À l’heure actuelle, le taux de chômage au Canada est de 5,6 %, soit l’un des plus bas taux jamais vus en 40 ans. En outre, il devrait rester faible l’an prochain. La pénurie de main-d’œuvre devrait d’ailleurs être un sujet chaud au Québec. À l’échelle nationale, seule la Colombie-Britannique affiche un taux plus faible que celui de la Belle Province. Les salaires des deux côtés de la frontière augmentent depuis la fin de la récession, et la hausse moyenne devrait tourner autour de 3 % au Canada.
Inflation
Habituellement, la Banque du Canada vit bien avec un taux d’inflation de 2 % (tout juste sous cette cible à l’heure actuelle). Le taux d’inflation au Canada est comparable à celui de la plupart des grandes économies mondiales, sauf que ce taux pourrait diminuer légèrement en raison de la baisse marquée des prix du pétrole à la fin de 2018. Le taux d’inflation du Québec est faible, mais il devrait se rapprocher des 2 % en 2019. Le prix des biens de consommation courante oscille de manière assez équitable entre inflation et déflation (-5,2 % et -3,1 % respectivement pour l’essence et le pain, alors que les billets d’avion et les coûts de l’assurance automobile ont grimpé de 9,0 % et de 4,9 % respectivement l’an dernier) pour donner un taux d’inflation global d’environ -2 %.
Logement + dette des ménages
Au cours des 18 derniers mois, une taxe pour les acheteurs étrangers a commencé à être prélevée en Colombie-Britannique et en Ontario, le gouvernement fédéral a imposé des règles plus strictes et la Banque du Canada a procédé à cinq hausses des taux d’intérêt. Tous ces facteurs ont contribué à contenir le marché dans une grande partie du pays. Même si, en moyenne, les prix sont encore élevés, la situation semble mieux maîtrisée. Les villes à surveiller à partir de maintenant sont notamment Ottawa, Montréal et Hamilton, étant donné qu’aucune taxe pour les non-résidents n’y est imposée. Aucune hausse de prix considérable n’est prévue à l’échelle nationale, tout particulièrement après la frénésie qui s’est emparée des marchés de Toronto et de Vancouver il y a quelques années. La hausse des taux d’intérêt pourrait ralentir quelque peu le marché, mais la croissance soutenue de la population viendra probablement rééquilibrer le tout.
La dette des ménages a elle aussi connu une accalmie. Depuis la fin de la récession en 2009, deux facteurs ont tout particulièrement soutenu l’économie canadienne : le marché du logement et les dépenses de consommation – tout particulièrement les ventes de voitures. Toutefois, ces deux secteurs sont en perte de vitesse à l’heure actuelle. D’où viendra donc la croissance? Les exportations profiteront de l’ACEUM, de l’AECG et d’une entente avec des marchés asiatiques. Les dépenses d’infrastructures seront sans doute un autre moteur de croissance.
Stabilité des dollars
Malgré l’incertitude qui a régné tout au long de la dernière année, le dollar canadien est demeuré en bonne posture jusqu’à la fin de 2018. Dans ses prévisions, M. Porter a indiqué qu’il devrait se raffermir que légèrement au cours de 18 prochains mois. En ce qui a trait aux taux d’intérêt, la Banque du Canada souhaite un retour à la normale. Cependant, si le prix du pétrole reste bas, la Banque du Canada pourrait changer son fusil d’épaule, ou du moins agir plus lentement. La plupart des grandes banques prévoient que la Banque du Canada haussera les taux d’intérêt à une, deux ou trois reprises en 2019, la BMO en prévoyant deux. Il en va de même aux États-Unis : la hausse des taux par la Réserve fédérale a été progressive et peu prononcée. Les prévisions indiquent que les États-Unis procéderont à deux autres hausses de taux au cours de la prochaine année (après quatre hausses appliquées en 2018).
Dans l’ensemble
- Il faut surveiller l’évolution des tensions entre les États-Unis et la Chine, car il pourrait s’agir du facteur ayant la plus grande incidence sur les marchés mondiaux en 2019.
- À plus long terme, les taux d’intérêt devraient revenir à la normale, ce qui pourrait miner l’économie américaine.
- Les entreprises essaient toujours de s’y retrouver dans les innombrables changements engendrés par les baisses d’impôt aux États-Unis.
- Parmi les éléments difficiles à prédire, notons le Brexit, le budget de l’Italie, la politique en cours aux États-Unis ainsi que les élections fédérales du Canada qui seront tenues en octobre 2019.
*Les faits et les données présentés ci-dessus sont des extraits traduits de la présentation de M. Porter.