Prévisions économiques 2025 de Richter pour le Canada : tarifs douaniers, commerce et tendances

L’édition annuelle des Prévisions Économiques Richter a présenté une discussion approfondie et éclairante avec M. Andrew Grantham, Directeur général et économiste principal chez CIBC, animée par Joe Triolo, associé chez Richter. M. Grantham a couvert divers sujets, allant des marchés immobiliers locaux aux tarifs commerciaux et aux projections de récession. Voici les principaux points abordés lors de cette discussion.

Group of persons listening a conference

TARIFS DOUANIERS, COMMERCE ET ÉLECTION FÉDÉRALE

L’un des sujets majeurs qui captent l’attention est la menace de l’administration Trump d’imposer des droits de douane de 25 % sur la plupart des importations canadiennes et de 10 % sur l’énergie, à partir de mars 2025. Pourquoi? Le Canada demeure une cible facile en raison de sa dépendance économique au marché américain et d’un certain vide politique alors que le pays se dirige vers une élection fédérale. De plus, certains experts estiment que Trump cherche une victoire rapide pour appuyer ses promesses électorales. Bien qu’un éventuel changement de gouvernement au Canada puisse offrir une meilleure visibilité sur la gestion de ces tarifs, l’ampleur exacte de ces mesures demeure incertaine.

  • Diversification commerciale et économique
    La dépendance excessive du Canada à l’égard du commerce américain reste un sujet de préoccupation, puisque nous exportons environ 75 % de nos biens vers les États-Unis.. Diversifier les échanges vers l’Union européenne et d’autres marchés devient une priorité pour les entreprises et le futur gouvernement afin de réduire cette vulnérabilité.
  • L’élection fédérale
    Les prochaines élections fédérales pourraient avoir un impact sur plusieurs secteurs. Tous les partis évoquent des réductions de la taxe carbone pour alléger temporairement l’inflation. Toutefois, le déficit fédéral canadien reste modéré par rapport au PIB, ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire d’effectuer d’importantes coupures budgétaires. Une réduction progressive pourrait permettre d’atteindre un équilibre budgétaire sans freiner la croissance économique.
  • Les barrières interprovinciales
    Le commerce interprovincial au Canada fait face à des obstacles, notamment les différences linguistiques et les exigences de certification, ainsi que des défis géographiques. Bien que le potentiel de croissance soit limité à 1-2 % du PIB, il s’agit néanmoins d’une opportunité à explorer, surtout dans un contexte d’incertitude avec les États-Unis.

LA BANQUE DU CANADA

Inflation
L’inflation demeure un défi. Si une réduction temporaire de taxes a permis de la freiner, la hausse des prix du carburant et la vigueur du marché du travail la font remonter. Actuellement, l’inflation est de 1,9 % en glissement annuel, qui est conforme à l’objectif global de 2 %, mais sans la réduction de la TPS, ce taux serait plutôt autour de 2,5 %.

La Banque du Canada s’appuie sur des mesures de l’inflation qui excluent la volatilité mensuelle. Ces indices montrent une légère reprise économique ces derniers mois, ce qui pourrait influencer la politique monétaire. Trois nouvelles baisses du taux directeur sont attendues cette année.

Marché immobilier et hypothèques
La Banque du Canada devrait réduire les taux d’intérêt plus que ce que les marchés financiers anticipent. Trois baisses du taux directeur pourraient faire reculer les taux hypothécaires fixes sur 5 ans, facilitant le refinancement.

Les emprunteurs qui ont acheté en 2020, à des taux historiquement bas, feront face à des refinancements plus élevés en 2025-2026. Toutefois, la hausse des paiements mensuels serait en ligne avec l’augmentation des salaires des dernières années, limitant l’impact sur le pouvoir d’achat.

Sur le marché immobilier, la demande pour les maisons unifamiliales repart à la hausse avec la baisse des taux, tandis que le marché des condos est en difficulté, particulièrement à Toronto et Vancouver. Les promoteurs ralentissent la construction de tours d’habitation, et l’intérêt des investisseurs reste faible. Une baisse des taux d’intérêt pourrait relancer ce segment du marché.

RISQUE DE RÉCESSION ET PROJECTIONS ÉCONOMIQUES

En temps normal, la probabilité d’une récession est d’environ 15 % par année. Les récessions surviennent en moyenne tous les 10 ans. Toutefois, avec la menace des tarifs douaniers, cette probabilité grimpe à 25-30 %.

  • Un scénario de tarifs à 10 % pourrait ralentir la croissance à 1 % par an, mais éviterait une récession.
  • Un scénario de tarifs à 25 % entraînerait une récession légère.
  • Une guerre commerciale mondiale ferait chuter les prix des matières premières, ayant un impact majeur sur l’économie canadienne

EMPLOI, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ET CONSOMMATION

Le marché du travail s’améliore par rapport à 2023-2024. Le taux de chômage est passé de 6,9 % à 6,6 %, bien que toujours 1 % plus élevé que le niveau optimal pour maintenir une inflation à 2 %.
Deux grands facteurs pourraient influencer le marché du travail :

  1. Les décisions de la Banque du Canada sur les taux d’intérêt.
  2. Les politiques commerciales des États-Unis, notamment si des tarifs sont imposés.

Concernant l’intelligence artificielle, les transformations seront progressives. Certains secteurs seront touchés, mais de nouvelles opportunités émergeront, comme cela a été observé avec d’autres avancées technologiques.

  • Consommation et commerce de détail
    La croissance de la consommation devrait ralentir, mais l’immigration et la croissance démographique soutiendront la demande pour les biens essentiels. L’évolution des dépenses discrétionnaires dépendra des taux d’intérêt et de la politique commerciale américaine.

Si l’économie canadienne parvient à éviter des tarifs douaniers sévères et que la Banque du Canada ajuste bien sa politique monétaire, les dépenses pourraient repartir à la hausse dans la deuxième moitié de 2025 et en 2026.

PERSPECTIVES D’AVENIR : INCERTITUDE ET TRAJECTOIRES ÉCONOMIQUES

Les années à venir seront déterminantes pour la résilience économique et la diversification du commerce canadien.
L’évolution de l’économie canadienne dépendra de plusieurs facteurs :

  • Les décisions tarifaires américaines
  • La politique monétaire de la Banque du Canada
  • Les choix budgétaires du gouvernement fédéral

Le Canada possède une marge de manœuvre pour croître sans créer de pressions inflationnistes excessives, mais une escalade des tensions commerciales pourrait provoquer une récession modérée. En cas de guerre commerciale mondiale, la Banque du Canada pourrait devoir réduire fortement ses taux pour soutenir l’économie.